Un petit fruit peut vous changer une vie. Chez les Massenez, on doit beaucoup à la framboise sauvage. Jean-Baptiste, bouilleur de cru en 1870, transmet l’affaire à son fils Eugène qui, en 1913, distille pour la première fois la framboise sauvage, « la plus féminine des eaux-de-vie » comme on aime dire dans la maison, qui séduit le palais de la Reine de Suède qui l’intronise dans sa Cour. Premier succès à l’international qui sera conforté par l’activisme de son fils, Gabriel Eugène, qui reprend les affaires en main en 1950 : « Avant-gardiste, il a compris très vite qu’il fallait aller à l’international, il a pris son bâton de pèlerin, fait je ne sais combien de fois le tour du monde. Il a même réussi à vendre de l’eau de vie de framboise aux Japonais qui ne connaissait pas le goût de la framboise ! Avec lui, Massenez est devenue une vraie marque de renommée internationale », souligne Manou Massenez Heitzmann, sa fille et dirigeante de l’entreprise qui a poursuivi le travail à l’export, pour être présent dans plus de 110 pays aujourd’hui.
DR Manou Massenez Heitzmann a su faire prospérer la distillerie familialeMais pas n’importe où : dans les épiceries fines, sur les grandes tables gastronomiques (Bocuse, Verger, Haeberlin…), à l’Elysée sous Giscard et Chirac, mais aussi dans les duty free du monde entier et à bord des compagnies aériennes. Pour les Massenez, le segment du luxe s’est imposé de lui-même : « En Alsace, la réglementation interdit de rajouter des extraits, arômes, bonificateurs : on ne peut pas tricher. Il nous faut donc un fruit parfait et beaucoup de fruit, ce qui donne un prix de revient élevé. Et on respecte toujours l’origine du fruit : la poire williams vient de la Vallée du Rhône, la mirabelle de Lorraine, les prunes et quetsches d’Alsace… », poursuit la dirigeante, pas peu fière des récompenses obtenues par ces breuvages dans les concours internationaux.
Loin de se reposer sur ses lauriers, l’entreprise évolue et innove, et encore plus depuis qu’elle a été cédée en 2011 aux Grandes Distilleries Peureux dans les Vosges, faute de descendants intéressés par la reprise. Un véritable « coup de fouet » impulsé par Bernard Baud, son dirigeant, et Elodie Naslin, responsable marketing, qui lancent nouveautés sur nouveautés, et donnent autant d’importance au contenu qu’au contenant. Les grands classiques sont ainsi revisités, comme la poire prisonnière Williams désormais prisonnière d’une bouteille très design, baptisée Golden 8, clin d’œil à James Bond : « On a refait la recette et l’habillage de la bouteille pour une liqueur de poire avec un goût plus prononcé, une couleur un peu plus dense, sur un segment plus masculin, plus viril », énonce la dirigeante. L’an dernier, la distillerie a pris le contre-pied de ses concurrents sur le marché du gin, en proposant un digestif haut-de-gamme à déguster plutôt qu’à dissoudre dans un cocktail, là encore dans une bouteille design qui renferme une grillotine « ce qui donne un goût d’amande amère et cette couleur délicate rosée. »
Mais l’entreprise le sait : l’avenir est ailleurs ! « Le digestif est un produit vieillissant, plus trop consommé en France. La nouvelle génération est beaucoup plus portée sur les cocktails. Et puis, prendre un digestif sur glace, c’est quand même très fort. En cocktail, il y a la saveur délicate du fruit qui ressort », note la dirigeante. L’entreprise a donc pris un parti pris féminin et lancé la gamme Miss Massenez : un concentré de cocktail à 30° (Pina Colada, Mojito, Sex on the beach…) à qui il suffit de rajouter deux doses de jus de fruit : « Cela convient aussi bien aux restaurateurs qui n’ont pas de barman qu’à un jeune qui veut fêter son anniversaire ! ».
En 2017, l’entreprise frappe encore davantage les esprits avec une révolution dans le domaine : la gamme Garden Party, des sprays à 69° et des liqueurs à 25° à base d’ail, de basilic, de cèpe, de concombre ou d’olives noirs… Totalement bluffant ! « Depuis 1870, on distille des fruits. Pourquoi changer notre cœur de métier ?, interroge Manou Massenez Heitzmann. Mais on s’adapte au monde qui change : les jeunes vont vers le végétarisme, vers les produits naturels et bio. Le monde du bar connaît aussi une révolution avec des mixologues qui expérimentent des saveurs et arômes totalement différents. On s’est dit : pourquoi ne pas innover avec les légumes et les plantes aromatiques ? C’est totalement dans l’air du temps. Bernard Baud a une phrase que j’aime bien : on s’est donné le droit de passer du verger au jardin. » Et ça marche : cette gamme, déjà primée au SIAL à Paris, le grand salon de l’innovation alimentaire et lors des Trophées Alsace Innovation, séduit aussi bien les barmans que les cuisiniers amateurs. De quoi voir l’avenir avec le sourire pour la quatrième génération des Massenez, même si l’entreprise quitte le giron familial.
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